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Qu’est-ce qu’une conversation spirituelle ?

La conversation spirituelle est la méthode choisie par François pour les discussions en petits groupes du synode sur l’avenir de l’Église, qui s’ouvre mercredi 4 octobre. Explication d’Annick Bonnefond, qui accompagne des groupes au sein de l’ESDAC (Exercices spirituels pour un discernement apostolique en commun).

Qu’est-ce qu’une conversation spirituelle ?

Annick Bonnefond : C’est une conversation humble, profonde et bienveillante qui a la particularité de s’ouvrir à la présence de l’Esprit saint. Elle est inspirée par les Exercices spirituels de saint Ignace de Loyola. La conversation se pratique à deux ou à plusieurs aussi bien dans un contexte chrétien qu’amical, familial ou professionnel. Cet échange repose sur la conviction d’au moins un des participants que le Saint-Esprit est donné à chacun ; et que son écoute est à la fois intérieure (on prie l’Esprit de nous inspirer) et tournée vers la parole de l’autre. Cela implique une certaine manière d’écouter et de parler.

Quelle est la place de l’écoute ?

A. B. : Elle est première, nous rappelle saint Jacques : « Sachez-le, mes frères bien-aimés : chacun doit être prompt à écouter, lent à parler » (Jc 1,19). L’écoute véritable est un chemin exigeant. Elle nécessite d’accorder sa pleine attention — être attentif à ce qui est dit et à la façon dont c’est dit — sans se laisser distraire par ce qu’on voudrait répondre, en mettant de côté ses a priori et ses jugements ; et en étant convaincu que ce que l’autre me livre, à ce moment-là, est précieux. Il s’agit de « sauver la proposition » du prochain, comme dit saint Ignace de Loyola, sans pour autant le placer sur un piédestal.

Qu’en est-il de la parole ?

A. B. : C’est une parole personnelle (exprimée par un « je », et non par un « on »), empreinte de liberté, de vérité et de courage. Elle est pesée et réfléchie. C’est une parole qui relève du partage d’expérience.

Quelle est la finalité d’une conversation spirituelle de groupe ?

A. B. : Aboutir à une prise de décision, partagée par tous les participants. Nous considérons le groupe comme un sujet à part entière, avec une histoire qui est relue pour découvrir la présence et l’action de Dieu. L’écoute est double : celle de Dieu et celle de la vie commune.

Avez-vous des exemples de discernement communautaire ?

A. B. : Oui, ils sont très variés : l’accompagnement d’une colocation étudiante ou celui de l’assemblée mondiale de la Communauté de Vie chrétienne à Buenos Aires en 2018, qui devait aboutir à de nouvelles orientations ; la fusion de deux congrégations religieuses ou la création d’une association de laïcs, envisagée par une dizaine de femmes aux parcours et aux profils très différents. Autre cas marquant : une retraite, rassemblant une douzaine de personnes, survivantes du génocide du Rwanda, qui choisissent de se mettre au service de leur peuple traumatisé.

Quels bénéfices avez-vous constatés ?

A. B. : Une « sortie de soi » s’opère chez les participants : on est prêt à abandonner sa position si une idée meilleure surgit. Le « je » et le « tu » s’acheminent vers un « nous » — une dimension souvent oubliée dans notre société individualiste. Face à des problèmes de gouvernance et de pouvoir, je me souviens de cette communauté qui a pris le temps de mettre à plat ses tensions. La redécouverte de leurs valeurs profondes a fait grandir une communion entre les participants et rendu possible une décision à l’unanimité.

La Croix
3 octobre 2023
Propos recueillis par Gilles DONADA

Aimer notre incomplétude

« Cette incomplétude qui maintient l’esprit ouvert est la condition même du mouvement vers le monde et vers autrui. Éduquer, alors, ce n’est pas « compléter », mais accepter de « creuser » ensemble, reconnaître combien l’on a à apprendre, combien l’on dépend de cet enfant… qui dépend de nous. Nous ne sommes pas en position de nous compléter les uns les autres, ni en nous aimant, ni en nous aidant. Mais nous ne pouvons ni nous refermer sur un savoir suffisant, ni nous soutenir nous-mêmes. [...] »

Initier des processus

« En accord avec un autre principe « le temps est supérieur à l’espace », le Pape suggère d’initier des processus plutôt que de chercher à défendre des positions et des espaces de pouvoir. En effet, les personnes qui cherchent les solutions parfaites et luttent passionnément pour leur réalisation – souvent peu réaliste – risquent en fin de compte, par leurs tentatives, d’entraver la solution des conflits. Quand on cherche à résoudre un problème, il est nécessaire de se demander si les solutions proposées et élaborées servent principalement à défendre sa propre position ou si elles peuvent initier une dynamique positive, génératrice d’autres processus de développement. [...] »

Ne pas enfermer dans une image

« Nous sommes des êtres de chair, et nous ne pouvons pas vivre sans images ; et dès que nous sommes en face d’autrui, dans une position parentale ou éducatrice, nous risquons d’engager la relation en fonction de l’image que nous nous faisons de lui. Le contenu de la loi n’est que l’explicitation de ce mystérieux « nous » sans image qui préside à la « formation » de l’homme : « Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance… Mâle et femelle il les créa ». [...] »